Une visite vidéo de Beaux Arts en 100 secondes Voir puis des photos de Charlotte Szmaragd, que l’on agrandit par un clic.
L’exposition officielle est présentée dans deux espaces majestueux à l’est de la presqu’île : la Corderie de l’Arsenal et le pavillon central des Giardini.
Organisée en 9 sections thématiques (appelés « pavillons »), elle regroupe 120 artistes originaires de 51 pays. Du « Pavillon des artistes et du livres » au « Pavillon du temps et de l’infini », le spectateur est invité à découvrir un vaste territoire peuplé d’œuvres inédites produites pour l’occasion par les plus grands noms de la création contemporaine. A l’Arsenal, Ernesto Neto avec José de Lima, dans le « Pavillon des chamanes », réalise une installation immersive inspirée de rituels chamaniques amérindiens, sous la forme d’une tente monumentale tissée en crochet abritant des couchages de méditation et des plantes.
Un peu plus loin, avec Michel Blazy, le vivant devient merveilleux : des végétaux poussent dans une « Collection de chaussures » et une « Forêt de balais » danse à l’intérieur d’un jardin extraordinaire. Kader Attia illustre avec poésie des théories scientifiques sur les ondes sonores. Sous des globes de verre, des graines de couscous deviennent des figures géométriques en suivant le rythme des voix des plus grandes chanteuses du Moyen-Orient. En réponse, pour Olafur Eliasson au Giardini, la géométrie et les nouvelles technologies servent à repenser la manière de construire ensemble l’espace à l’intérieur du « Green light » workshop. A contrario, l’espace est essentiellement sensible au travers des dessins sur verre de l’artiste féministe Kiki Smith.
A côté des personnalités déjà célébrées, la sélection propose un véritable renouvellement du panorama artistique avec 103 artistes qui participent pour la première fois à l’événement, livrant des travaux ambitieux et particulièrement remarqués. Parmi les œuvres les plus marquantes, le textile est à l’honneur. Dès l’entrée de la Corderie, Mingwei Lee détisse des vêtements donnés par les visiteurs et les projette sur les murs de l’exposition : lien matérialisé entre le regardeur et l’oeuvre.
Le kosovar Petrit Halilaj a obtenu une mention spéciale du jury avec des costumes de mites géantes cousus de tissus sombres partant à l’assaut des hauteurs du hangar.
Autre appropriation grandiose de l’espace, les pelotes en laine monumentales et multicolores de Sheila Hicks dans lesquelles on voudrait se blottir.
En chemin, comment ne pas mentionner l’oeuvre d’art totale de Pauline Curnier Jardin, « Grotte profonde » ouverte sur une autre dimension volontiers fictionnelles dont l’entrée est une main géante en papier mâché.
Pendant de la sélection officielle, il y a les très nombreux pavillons nationaux, la plupart édifiés dans les Giardini et d’autres visibles dans différents lieux insolites de la ville. Parmi les démarches d’artistes venus de tous les horizons, on reste sous le choc de la performance nommée « Faust » orchestrée par Anne Imhoff, ayant obtenu le Lion d’or des pavillons Voir . De hautes grilles cernent l’entrée du pavillon, derrière lesquelles deux dobermans aboient et des jeunes habillés en noir qui, comme dans un zoo humain, tournent en rond, crient, se battent, le regard vide et épuisé, parmi les visiteurs tout autant captivés qu’effrayés.
Plus intime, dans le pavillon belge, les photographies travaillées à la chambre noire, de Dirk Braeckman. Ces images très sombres sont envoutantes avec des effets subtils et des reflets moirés de lumière, mêlant des fragments de corps féminins, des étoffes ou des paysages.
C’est l’architecture même qui devient paysage dans le pavillon israélien où l’artiste Gal Weinstein propose une installation à même le sol et les murs de plaques de laine de verre altérées imprégnées de café. La sensation inonde tout l’espace telle l’énorme nuage sculpté aussi en laine occupant tout l’étage.
En sortant des lieux dédiés, de nombreux pays ont investi des palais vénitiens habituellement fermés au public. Ainsi au Palazzo Lezze sur le Campo San Stefano, l’Azerbaijan évoque le multiculturalisme et les sculptures d’Elvin Nabizade chante l’unité en assemblant les différents instruments de musique des ethnies et autres nations vivant dans le pays.
Enfin la Biennale d’art semble être de plus en plus foisonnante en événements collatéraux, pour la plupart en entrée libre. Au détour des canaux, des œuvres monumentales modifient la temporalité des lieux telles ces deux mains géantes de l’artiste Lorenzo Quinn surgissant du Grand Canal pour sensibiliser les visiteurs au changement climatique et aux risques que la montée des eaux fait courir à la ville. De véritables pépites sont à dénicher dans cette effervescence.
« Mutumia » de Phoebe Boswell, exposée dans le cadre de Future Generation Art Prize dans le vaste Palazzo Contarini, est une installation interactive dans laquelle de grands dessins de corps nus prennent vie en fonction de nos propres mouvements.
Puis, en habitué de la Biennale, Jan Fabre s’installe à l’abbaye San Gregorio et utilise le savoir-faire des maîtres-verriers de Murano en élaborant d’impressionnantes figures macabres.
Visiter la Biennale est une immersion totale dans l’art d’aujourd’hui. L’art y est partout et les grandes institutions culturelles de la ville participent à l’étendue de l’événement par une programmation particulièrement attractive. On ne pourra donc pas quitter la ville sans avoir vu l’exposition grandiloquente de Damien Hirst à la fondation Pinault Voir, démonstration titanesque du pouvoir de l’art.
Charlotte Szmaragd
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