Un site de découvertes de l’art contemporain en résonance avec le projet culturel et spirituel de Saint-Merry-hors-les-Murs

V&D sur instagram

Accueil > Regarder > V&D décrypte des œuvres et des expos > Sandrine Saïah. Par-delà nos frontières


Sandrine Saïah. Par-delà nos frontières



Est-il possible de représenter comment le monde numérique s’est emparé de nos corps ? Une anthropologue artiste reformule questions et réponses sur un mode visuel. Galerie Talmart

La question posée par Sandrine Saïah dans cette exposition de 2023 de la galerie Talmart est simple : comment notre corps vit-il dans un univers où le numérique occupe progressivement tout notre espace, mental et physique ?
L’artiste est née en 1957, vit et travaille à Bordeaux. Elle intervient dans l’art avec les questionnements contemporains de l’anthropologue sur la place des corps dans la société numérique. Dans cette galerie, elle rassemble plusieurs créations de ses cinq dernières années. Ses œuvres toutes particulières et différentes reposent sur des recherches au long cours sur le numérique et sont formellement reliées les unes aux autres par la précision étonnante de ses découpages et tirages numériques. Il y a de la beauté, ses associations pertinentes ne sont pas dissociées d’un désir de beauté et d’un souci jubilatoire de montrer, voire de démontrer.
Nous connaissions les limites de notre corps donc ses frontières, mais n’est-il pas désormais débordé ?
Jean Deuzèmes

Dans cette galerie où les nombreuses œuvres sont très proches les unes des autres, celles qui ouvrent l’exposition, « Antipodes », sont les plus récentes et donnent le ton. Sandrine Saïah a interviewé 8 personnes de 17 à 77 ans sur la question de la place du numérique dans leur vie. Ensuite elle a réalisé 8 bustes en terre, « Têtes » (2023), associés à des œuvres d’une autre nature : des séries numériques d’impression sur papier « Profil numérique » (2023) et «  Regards ubiquistes » (2023).

Têtes
Profils numériques
Regards ubiquistes

Propos du commissaire

Sandrine Saïah confronte deux types de représentation de l’humain du début du XXIe siècle, pour penser l’étendue de l’écart entre un “profil numérique“ et une tête en ronde-bosse comme les antipodes de la figuration de l’humain puis estimer la possible articulation entre eux pour concilier leur dissemblance ou pas.

Depuis une vingtaine d’années, Sandrine Saïah s’illustre en tant qu’artiste anthropologue. [Ses recherches] sur les frontières du corps] sont aux prises avec les révolutions technologiques qui bouleversent nos repères spatiaux. Univers en expansion, expansion numérique et mondialisation interfèrent sur nos représentations et par conséquent sur notre rapport à l’espace, aux espaces. […]
À travers une partition de pièces singulières, « Par-delà nos frontières » interroge la relation possible entre les espaces physique et numérique à l’aune de nos repères spatio-temporels. « Les deux notions inextricables espace/temps et corps/esprit qui ont prévalu dans l’édification de nos repères, ne se distordent-elles pas dans ce va et vient permanent entre ces deux espaces, dont l’un plat gonfle et l’autre en trois dimensions rétrécit ? » nous demande-t-elle.

Portant

Avec son installation Portant (2017), l’artiste-anthropologue convoque alors des silhouettes d’anonymes en taille réelle, bien qu’individualisées par le contour de leur corps imprimé sur vinyle, pour former un ensemble de singularités dont les dénominateurs communs du numérique constituent des flux de données et d’informations qui les connectent. Les innombrables images fragmentaires qui ont laissé leur empreinte – indélébile ? – sur ces profils colonisés donnent à voir une réalité vertigineuse où le déplacement se fait sur une ligne du temps en constante progression.

Collectif frontal

Collectif frontal (2017) s’inscrit dans cette représentation d’une humanité numérisée sans densité physique. Sandrine Saïah pense en images. Elle les orchestre comme un langage dont on pourrait croire qu’elle est la seule à en avoir la maîtrise, érigeant subitement de nouvelles frontières qui n’en sont pas réellement. En effet, par un nécessaire retour aux origines du langage où la lettre est une image, une icône – à l’instar des idéogrammes – on franchit ces fenêtres capturées pour rejoindre dans une autre temporalité des territoires jadis privés devenus publics par la numérisation de l’humanité. Alors, une multitude de directions nous sont offertes et ne manquent pas d’élargir le domaine de notre conscience pour la rendre mobile, quel que soit l’espace.

Cheminées

Cheminées (2022). Si l’on n’ose pas un tel détachement avec notre propre réalité, Sandrine Saïah renverse les cadres et le champ visuel frontal traditionnel de notre espace physique avec la structure Cheminées pour redonner du souffle, du rythme, en déployant une succession verticale d’images.

Images fuyantes

Tandis qu’avec la série d’impressions sur Dibond Images fuyantes, elle explore l’espace numérique dans sa platitude, son encombrement, sa systémique pour le désordonner, le désorienter, l’aérer. À travers ces nouveaux champs de vision, l’artiste-anthropologue donne de la profondeur et de la perspective à ces images qui nous font face à plat. Il s’agit d’expérimenter un autre rapport à l’image qui ne serait pas en deux dimensions.
Grigori Michel


Galerie Talmart, 22 Rue du Cloître Saint-Merri, 75004 Paris
3-14 octobre 2023

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.