Quentin Guichard. In Overscheyt. Série de sept œuvres. 2020 from Voir & Dire on Vimeo.
« Hadewijch d’Anvers, béguine flamande du XIIIe siècle, use dans ses visions d’un mot à l’aura incandescente : Overscheyt. Il signifie "l’abîme d’en haut". Par cet oxymore, Hadewijch touche aux limites du langage et de la représentation. Elle formule une intuition : l’absolu est un espace intérieur qui ne peut s’exprimer que dans ses contrastes les plus intenses.
Ce mot aux sonorités si étranges m’a toujours fasciné. Il incarne la tension sur laquelle nos mythes et nos œuvres sont fondés. Pour l’artiste, il est une image qui s’invente. Pour les scientifiques, un rayonnement diffus à la signature infinitésimale. Ainsi, comment dépeindre la lumière et l’obscurité originelles ? Quel sens donner à la matière qui l’a fait naître ? Ces interrogations évoquent un temps aujourd’hui daté : 380 000 ans après la fission originelle et l’expansion de la matière, le refroidissement d’un univers intensément dense et chaud permit la libération de la lumière. Avec elle, la naissance de l’espace.
Je cherche ainsi à dépeindre ce temps où soudain la lumière est ; pure puissance qui pulse derrière le voile. Telles des images arrêtées du temps, les œuvres de la série "In Overscheyt" semblent être des irradiations sur le seuil de la perception, cristallisées entre l’abîme qui les précède et l’éblouissement qui s’ensuit. La lumière éclaire la matière d’une lueur nouvelle, fusant dans l’espace en même temps qu’elle le crée, déployant ses ombres portées et ses incidences opaques. Se dessinent alors des horizons incertains : cimes, calderas et montagnes se dressent avant le temps géologique, toutes entières chargées de couleurs évoquant la terre et l’embrasement à venir.
Fruits d’une accumulation méticuleuse de milliers de matières brutes photographiées en Islande, chaque oeuvre invite le spectateur à plonger en elle comme autant de paysages intérieurs. Strate après strate, par jeu de transparences et de recouvrements, la lumière s’élabore elle-même, comme un phénomène pictural.
Quentin Guichard
Note technique
Création entre 2018 et 2019.
Impressions d’encres pigmentaires.
Papier Hahnemühle baryta 315 gr.
Formats 130 × 160 cm, 200 × 160 cm, 140 × 160 cm. Contrecollages sur aluminium 1 mm.
Caisse américaine en bois wengé brut.
Limitées à 5 exemplaires + 1 E.A.