L’œuvre s’étend sur trois dimensions
– un écran vertical, légèrement translucide, de 12 m de haut placé devant le grand autel
– le sol et son dallage magnifique du XVIIIe qui sert d’écran et prolonge le précédent vertical
– une musique envoutante qui a été composée en lien avec les images produites mais qui ne dérive pas informatiquement des formes visuelles comme savent le faire les musiciens expérimentaux.
L’esprit est attiré par les ensembles de signaux lumineux des images projetées que les sons amplifient.
Les séquences verticales sont formées d’un assemblage de formes et dessins issus de multiples sources qui ont été scannées puis travaillées par des applications du Net. Ondulations de paysages pixélisés succèdent à de grandes figures géométriques, amplifiant l’art géométrique des années 60-80 qui utilisait des moyens ou objets matériels basiques. Puis surviennent des images immédiatement reconnaissables comme une façade de la cathédrale, celle de Bruxelles, dont la pixellisation pourrait évoquer les tableaux de Monet à deux différences près et non négligeables, tout est mouvement et l’échelle est démesurée. L’image sidère l’œil, alors que dans la peinture impressionniste l’œil est en mouvement dans une peinture fixe évoquant la vibration de la lumière. Ici, pas de couleur, mais uniquement du Noir et Blanc.
Les séquences horizontales relèvent d’une autre logique, celle de la géométrie pure de la lumière. Les artistes ont fait ici un travail d’une haute technicité. Ils ont relevé la géométrie du carrelage noir et blanc, au joint près, puis en ont fait des images à partir de cette géométrie qu’ils projent (mapping) sur le dallage même. En inversant les couleurs du carrelage Noir/Blanc de leur projection, ou en éteignant certains de leurs carreaux virtuels, l’artiste fait vibrer visuellement le sol réel ; on pense alors à la dynamique spatiale des boules de lumière en boite de nuit. Certains plans se conjuguent avec l’écran vertical. On comprend pourquoi les visiteurs se sont assis sur ce carrelage : prendre un bain de lumière et devenir l’écran de l’œuvre.
La musique envoutante fonctionne en boucle de 29 minutes et en rappelle une autre, celle de la Nuit Blanche 2015 à Saint-Merry. Et pour cause, c’est la même ! Mais dans Blue Print elle est audible, car les visiteurs l’écoutent religieusement et ne sont pas troublés par des centaines de personnes entassées en mouvements bruyants.
Un projet original de Joanie Lemercier & James Ginzburg
Visuels : Joanie Lemercier
Musique : James Ginzburg and Yair Glotman
Production : Juliette Bibasse
La première édition de Blueprint a été commissionnée par STRP biennale d’art numérique de Eindhoven, en 2015