Didier Brousse, le commissaire, révèle ce qui l’a guidé pour concevoir son exposition.
Le regard et la main sont indéfectiblement liés : ils sont nos principaux moyens de contact avec le monde. Rien d’étonnant donc à ce que la photographie, art du regard, s’intéresse à la main.
Pour certains, il s’agit d’un sujet récurrent (Arno Rafael Minkkinen), ou souvent traité (Bernard Plossu, Patrick Taberna, Masao Yamamoto), plus rare pour d’autres photographes, l’occurrence de la main dans leurs images est néanmoins toujours forte. Elle est là comme un signe qui nous inviterait à saisir une présence, à décrypter un sens.
Pour les photographes qui font de leur vie le matériau d’une œuvre, la main est un sujet qui tombe sous le sens du regard. Elle accompagne l’œil dans l’exploration du monde, créant, par sa présence dans l’image, une sorte de pont symbolique, par-dessus l’appareil photographique, entre le photographe et ce qu’il voit, ce qu’il nous montre. Elle est l’affirmation d’une vision subjective. Mais elle peut aussi être tout simplement un magnifique sujet. Expressive et signifiante, à l’égal d’un visage (quoique certainement plus énigmatique), la main nous parle comme le ferait un regard. En action ou au repos, outil agissant ou simple présence, elle interpelle le regard. Elle est une invite à la fois sensuelle (le sens du toucher) et spirituelle, symbolique. La photographie prolonge à sa façon l’expérience magique de la représentation des très antiques "mains négatives" pariétales : signe universel, archaïque, de la présence humaine, de l’existence.
C’est en fait une photographie de Kristoffer Albrecht qui a inspiré l’idée de cette exposition. "Hand behind a window pane, 1984", figure en couverture de son livre Memorabilia, paru en 2004. Le tirage de cette image énigmatique et douce, évocatrice à la fois de sensations très physiques (le toucher sur une vitre embuée), et d’une sorte de mystère, d’appel spirituel, a été à la fois le déclencheur et le "diapason" qui m’a guidé dans le choix des photographies de "La main".
Didier Brousse
La cinquantaine de photographies qui composent cette exposition a été choisie dans les archives
de la galerie et on y retrouve plus de la moitié des artistes que nous exposons régulièrement,
mais aussi quatre nouveaux arrivants :
– Takashi Arai (Japon, 1975), daguerréotypiste contemporain que nous avons montré avec succès au dernier salon Paris Photo.
– Anita Anrzejewska (Pologne, 1970) dont le travail, réalisé essentiellement en Asie, visions
rêveuses et crépusculaires, se décline en nuances de gris et noirs dans ses tirages somptueux,
comme autant d’éloges de l’ombre.
– Kristoffer Albrecht (Finlande, 1961), compagnon de longue date de Pentti Sammallahti, comme
lui photographe subtil et tireur perfectionniste. Kristoffer est aussi un amoureux du livre, éditeur
d’ouvrages en tirage limité dont nous présenterons un choix.
– Gregor Beltzig (Allemagne, 1979) enfin, collaborateur de la galerie et artiste lui-même.
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