Le titre : "I love the way you drive your corner" fait écho à une chanson de Lou Reed , représentant de la scène musicale underground new yorkaise des années 80 et 90, que les artistes aimaient écouter lors de la fabrication de l’œuvre et souligne la composition angulaire propre à cette œuvre. C’est sans nul doute plus humoristique que « Untitled » ou « Sans titre », autre titre qui se serait justifié.
Faite en bois, l’œuvre est issue d’un agencement initial en carton plié et découpé, un matériau pauvre, et fait référence aux polyptyques de Pascal Pesez et aux peintures murales de Élodie Boutry.
Les facettes multiples créées sont devenues autant de surfaces propices aux gestes de peinture et de dessins (bleu ciel et blanc) déconnectés des formes, proposant une élévation du regard par l’orientation des lignes. Le recto serait ainsi peinture, légère, géométrique et intrigante, tandis que le verso apparemment blanc, mais en fait tout de teintes dominées par un rose subtil, n’est que forme architecturée, avec ses pleins et ses découpes, mais créant de loin l’illusion d’une surface plate.
Très savamment construit, "I love the way you drive your corner" tient de la sculpture, puisqu’il faut en faire le tour de cet objet plastique pour tenter de l’appréhender. Il intrigue et oblige le spectateur à le considérer tel qu’il est ; non pas à le dévisager mais à l’envisager comme forme d’art, autre, dialoguant avec les piliers des bas-côtés dans une lumière d’automne qu’elle ravive ou encore la nuit. Une invitation contemporaine à la contemplation ?
Hybride et autonome, et refusant toute dimension illustrative ou allusive, cette œuvre est à l’image de toute une partie contemporaine collaborative de l’art qui s’affirme, y compris dans les églises, et cherche à dialoguer avec ces bâtiments.
« Ces deux écritures graphiques, bien que distinctes, ont ceci en commun qu’elles se déploient toutes les deux dans l’espace, qu’elles l’appréhendent avec gourmandise, avec un certain souci de la chorégraphie.
Cette danse joyeuse se poursuit bien au-delà des coins, s’interrompt dans les angles pour mieux rebondir et ouvre ainsi une brèche dans le champ cloisonné de l’art contemporain. » Élodie Boutry et Pascale Pesez
Cette forme est simplement belle. Elle a été conçue en 2012 pour la Chapelle du collège des Jésuites d’Eu.
V&D
http://www.elodieboutry.blogspot.com et http://www.pascalpesez.net