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Péter Alasztics, Pietà-Croce



Entretien autour d’une œuvre marquée par le minimalisme et le constructivisme. Exposition dans le claustra de Saint-Merry, ayant eu lieu du 17 avril au 7 mai 2011.

Péter Alasztics est un jeune artiste hongrois qui n’a jamais exposé en France et qui, l’année passée, est venu spontanément proposé une maquette de Piéta à l’équipe d’Accueil de Saint-Merry. Cette œuvre était prometteuse et a été retenue pour être exposée durant le temps pascal. Revenu en Hongrie, il a fabriqué cette œuvre à grande échelle et en a proposé une supplémentaire !
Ses œuvres épurées puisent dans les courants minimalistes, mais aussi de la grande tradition constructiviste russe et hongroise.

"J’ai eu l’idée de moderniser les images des saints. À chaque saint est attaché un symbole singulier : Saint Jean-Baptiste, la tête ; Saint Sébastien, la flèche, Saint André, la croix, etc. Mon travail a été de minimaliser l’image de ces objets".

Entretien avec V&D et commentaire d’une œuvre dont l’installation en un lieu précis peut ouvrir à une activation du sens.

Les œuvres et leur positionnement

Dans cette Pietà où la couleur et la géométrie de la tôle peinte vont à l’essentiel, la mère porte le fils, liée à lui, emboîtée dans la douleur. L’inclinaison de la tête du fils est l’inverse de celle de la croix de résurrection. L’ensemble est déposé dans le claustra, un endroit à taille humaine de la vaste église, celui où des petits groupes font halte. La douleur est ici signifiée dans l’intime.

La croix que l’on pourrait appeler ici croix de résurrection, du fait de l’inclinaison de la tête, va elle aussi à l’essentiel, par sa couleur unique et sa simplicité.

Cette sculpture contemporaine est installée dans une chapelle baroque où la lumière vient non des fenêtres mais des trois lanterneaux, ce qui renforce l’effet visuel.

Cette croix devient alors lumineuse.

Or, sous le dallage, subsiste un ossuaire du XVIe siècle.

Cette installation visuelle reprend ainsi les textes de la résurrection et les traditions picturales.

Entretien avec V&D

Les œuvres que vous proposez à Saint-Merry pour le temps de Pâques sont singulières : des sculptures épurées en acier peint, presque abstraites. Quel a été votre itinéraire artistique en Hongrie et ailleurs pour arriver á la maîtrise de ce matériau ?

Les sculptures que j’ai réalisées sont nées spontanément. Je lis et je voyage beaucoup, j’imagine et je dessine aussi beaucoup. Quand, je pense qu’une idée est bonne, je la concrétise par une œuvre.
En Hongrie je n’avais pas de grand projet. Je voulais partir à l’étranger, car pour moi le plus important est de découvrir et de comprendre les cultures de l’Europe.
Mon intérêt principal se porte sur l’époque gothique et la vie culturelle des XIIIe-XVe siècles.

Quelles difficultés techniques avez-vous rencontré en les construisant ?

Le plus grand problème pour réaliser ces sculptures tient à l’organisation du travail. Aussi, je travaille directement dans une usine de découpage de métaux et ses ingénieurs m’aident à la réalisation. Je commence par réaliser une maquette en carton, puis je dessine des croquis. C’est le moment le plus important pour moi, car c’est ici que naît l’œuvre.

Les œuvres présentées sont explicitement religieuses. Cela est-il fréquent chez vous de produire ce type d’œuvre ? Qu’est-ce qui vous intéresse dans le registre spécifique du religieux ?

J’ai commencé par peindre des sujets issus de l’histoire religieuse : Salomé, David et Goliath, Jonas etc. Les peintures du Caravage, de Véronèse m’ont beaucoup marqué, mais j’ai modernisé leurs thèmes.

Puis, lors de ma première année à l’université, j’ai découvert Mondrian et DeStijl, le constructivisme et le minimalisme.

Après avoir reçu un enseignement en histoire de l’art, j’ai eu l’idée de moderniser les images des saints. À chaque saint est attaché un symbole singulier : Saint Jean-Baptiste, la tête ; Saint Sébastien, la flèche, Saint André, la croix, etc. Mon travail a été de minimaliser l’image de ces objets.

En utilisant, la couleur et la géométrie, j’ai rendu plus claires encore les images de ces saints.

Quels sont les artistes qui nourrissent votre inspiration ? Appartiennent-ils à la tradition artistique (peinture ou sculpture) passée ou contemporaine ?

László Moholy-Nagy. Q 1 Suprematistic. 1923

Les peintres des icônes russes constituent une grande source d’inspiration. En effet, la géométrie qu’ils utilisent dans leurs œuvres est du même type que celle des constructivistes. Les constructivistes ont réalisé leurs œuvres avec des éléments cubiques et ronds. Je pense qu’il est possible de faire de même pour les images religieuses.

Lajos Kassak. Bildarchitektur

Je tire une grande partie de mon inspiration de Lajos Kassák, de László Moholy-Nagy et de Malevitch.

Quels sont les liens que vous entretenez avec la France ?

J’ai commencé par passer un mois à Paris, que j’ai visité de manière approfondie et plus particulièrement les monuments gothiques, qui sont en grand nombre et que j’aime beaucoup.

En visitant la vieille église de Saint-Merry, j’ai pensé que le cadre était parfait pour exposer une sculpture moderne.

Le contraste des époques est très intéressant, la confrontation dans la manière de penser la sculpture à l’époque médiévale et baroque et au XXIe siècle est vraiment féconde.

Site de l’artiste/ contact : p@qubehead.com

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