Texte de la commissaire
Alexander Zhyvotkov est né à Kiev en 1964. Sa formation artistique commence au sein de son cercle familial : son père Oleg Zhyvotkov, artiste, était membre d’un cercle s’opposant à l’art soviétique officiel.
Sa carrière débute à la fin des années 1980, avant l’indépendance proclamée de l’Ukraine en 1991. Elle prend tout son sens dans les multiples directions artistiques (intitulées « nouvelle vague ») engagées dans le cadre des évènements sociopolitiques contemporains, tels que l’effondrement de l’URSS et la pérestroïka.
Dans ses carnets de croquis étudiants (1986 – 1988), le jeune artiste explore minutieusement au crayon, fusain, sanguine noir et ocre, des sujets qui deviendront essentiels dans son œuvre. Caractérisée par des lignes gravées aux formes expressives, la calligraphie fait partie intégrante de son style.
À ses débuts, il travaille des matériaux simples : cartons, textiles, agglomérés et bâches. Depuis 2014, son œuvre intègre des reliefs sur bois et pierre dans des installations monumentales. L’intérêt de l’artiste pour la culture de son pays lui sert de sources d’inspiration : qu’elles soient artistiques – comme le décor des cathédrales de la région de Borisphenus – Dnipro et les saints sculptés de Johann Georg Pinsel – ou populaires, avec les ballades chantées des chumaks et des marchands ambulants.
Après le début du conflit armé, le 24 février 2022, l’artiste choisit de rester à Kiev, et commence une série d’œuvres dédiées à la guerre. La plupart sont consacrées à des attaques précises dans des lieux : Bucha, Marioupol, Kherson, Vinnytsia. D’octobre à décembre 2022, sous les raids aériens, Zhyvotkov travaille sur une série de reliefs intitulés « Tocsin ». Sous forme de cloches, les trois stèles présentées ici sont sculptées et peintes dans le bois et le marbre montrant des visages marqués par le traumatisme des affrontements.
Exceptionnellement parvenues à Paris grâce au soutien de l’Association « Unis pour l’Ukraine » et de la Stedley Art Foundation, les œuvres de l’exposition Tocsin seront présentées jusqu’au 10 avril face à la tour-clocher de l’église Saint-Séverin qui abrite la plus ancienne cloche de Paris (1412).
Angéline Scherf, commissaire février 2023