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Medium Textile, suite. Galerie Delaunay



Une magnifique exposition qui plonge dans la découverte de matériaux textiles nouvellement agencés. Des inspirations surprenantes. Un mélange de fragilités et de références. Le choix brillant de treize artistes. Une déstabilisation joyeuse.

Marjolaine Salvadore-Morel Anémochorie ou akène aigrette soyeuse, entre ciel et terre 1, 2015, dentelle en fils de nylon, 160 cm x 100 cm

S’il y a une galerie à voir en janvier-février 22, c’est bien celle de Valérie Delaunay. Pour deux raisons. Cette petite galerie, avec laquelle V&D a collaboré vient de déménager pour un espace grand et adapté, dans un quartier d’art plus vivant que celui désormais de Saint-Merry. Par ailleurs, la galeriste a invité comme commissaire, le grand spécialiste du textile Yves Sabourin, inspecteur de la création artistique au ministère de la Culture, qui connaît la plupart des grands créateurs d’œuvres en tissu, au sens le plus large qui soit. Ce conservateur a un humour fou et a été un commissaire marquant pour la galerie Saint-Séverin.
Tous ces artistes invités, quelles que soient leurs racines, présentent l’essentiel des expressions artistiques autour du médium textile : un somptueux paysage où l’harmonie est faite de complémentaritéś et de singularitéś des matériaux, comme des thèmes.

« Depuis la fin des années 80, le textile s’est installé dans la liste des médiums plastiques au même titre que la peinture, le dessin, le modelage, etc.
La nouveauté tient dans la révélation de sa picturalité regroupant sens et composition. En effet, le textile se sculpte comme une terre, se dessine comme un fusain, se dépose comme une couche peinte. Un coup de fuseaux ou d’aiguille n’est-il pas aussi expressif et sensible qu’un coup de crayon bien maîtrisé ? La technique n’est pas forcément nécessaire, et si elle est parfois incontournable, elle doit conjuguer liberté et rigueur.
 » affirme le commissaire dans le dossier de presse

Les créateurs ont des origines très diverses et l’exposition porte les traces de la maturation issue du confinement, donc de la solitude de création. Yves Sabourin, commissaire et directeur artistique présente ce bouillonnement visuel :

« D’abord issue du monde de la mode et du théâtre, Adeline André nourrit un subtil dialogue avec le textile ; issue des expressions plastiques en 2D ou 3D, Delphine Caraz choisit de modeler avec des vêtements usés, comme Arnaud Cohen détournant une tapisserie ancienne d’Aubusson ; Frédérique Fleury compose avec des fac-similés de tapisseries historiques et des pièces en grès ; Aurélien Lepage oscille entre peintures et tissages ; Edith L’Haridon transforme la maille en modelage truculent ; Marjolaine Salvador-Morel dessine dans l’espace des sculptures de dentelle à l’aiguille et l’interroge, comme le fait aussi Françoise Micoud avec la dentelle aux fuseaux chargée de pigments ; Patrick-Arman Savidan sculpte des ressacs en broderie ; Martine Schildge couvre de feutre des silex et « picturalise » leurs portraits photographiés ; Dominique Torrente met en scène les canevas de femmes couturières et les érige en bas et haut-relief ; Isabel Bisson-Mauduit mêle la photo à de la broderie machine et fait main ; et pour terminer Frédérique Petit trace avec un fil de soie des paysages au dessin épuré.  »

Il suffit de prendre quatre exemples pour donner le goût de consulter le dossier de presse…

Du plus petit au plus grand

Frédérique Petit, Ombre, 2021, broderie de fil fin de soie sur voile de coton, 9 cm x 13,9 cm

Frédérique Petit. Elle est capable de troquer l’aiguille et le fil de métal pour le fer à béton et le poste à souder qu’elle entremêle pour construire ses Grands nids qui interrogent dans leurs rudesses la fragilité.
Les séries présentées ici sont des broderies réalisées en fil de soie rapporté de Chine après un séjour de recherche sur la broderie à Suzhou. C’est une technique qui lui permet de dessiner librement la nature qui l’inspire et qu’elle contemple au quotidien, la beauté des oiseaux constructeurs aussi. Les œuvres ne font que 9 cm x 13,9 cm

Dominique Torrente, Les riches heures ou l’éclat de vos mains, 2018-2021, 350x290 cm

Dominique Torrente a choisi la toile brodée, peut-être comme possible métaphore de la pensée "complexe" et du paysage comme "complexion". Il y a quelques années, 
 elle découvrit des canevas brodés, réalisés à la main par les femmes des classes populaires, entre les années 40 et 80 et reproduisant Vermeer, Fragonard, Millet ou Renoir, elle fut fascinée par cet « art modeste », qu’elle entreprend de collecter, comme matériaux plastiques, mais aussi comme objets mémoriels. Car ces objets d’« art domestique » résonnent chez elle de tout un pan de son histoire personnelle, étroitement mêlée à l’histoire du monde ouvrier du siècle passé.
Ainsi l’œuvre « Les riches heures ou l’éclat de vos mains », (350x290 cm) est une juxtaposition de canevas constituant une tenture. Cela fait écho au travail manuel comme hommage aux mains ouvrières de ces femmes produisant ces objets : une sorte de paysage iconographique, un paysage « modeste » lui aussi plein d’affection et lié à l’histoire de ces toiles brodées.

L’arbre : de la forêt à la feuille, de l’expressionnisme puissant au bijou

Isabel Bisson-Mauduit, Bataille, 2018, broderie main et machine sur drap de coton légèrement tendu sur châssis, 75 x 110 cm

Isabel Bisson-Mauduit fait entrer dans une forêt incroyablement dessinée, brodée, on ne sait pas trop, qui tient de la toile d’araignée en pleine nature. Isabel est une ouvrière : elle brode comme une couturière, elle découpe, taille, colle, vernit... Cette matière concurrence les photos immenses de Paradis du grand artiste international Thomas Struth : des forêts impénétrables prises frontalement.

Françoise Micoud, Demain la première froidure, 2021, dentelle aux fuseaux, fils de lin et de métal, pigments, résine, 18 x 8 cm

Françoise Micoud est dentellière. Elle tisse des œuvres originales d’inspiration végétale en dentelle, réalisées aux fuseaux et sur papier.
Les formes et les couleurs de la nature l’inspirent. Ainsi, la dentelle aux fuseaux pigmentés, enduite de résine, devient la trame végétale de feuilles fragiles.
Ses feuilles ressemblent à des bijoux que l’on aimerait porter plus qu’accrocher à un mur. En outre, les noms sont uniques et introduisent à sa poésie de la main.
Alliant sa passion pour le textile à son amour du papier, cette artiste contemporaine utilise aussi ses dentelles comme matrices pour ses estampes.

Jean Deuzèmes


Galerie Valérie Delaunay , 2 Rue de Montmorency, 75003 Paris, 6 janvier au 26 février 2022

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